Après deux ans en tant que professeure assistante, j'ai décidé de prendre une année de césure. J'étais frustrée de ne pas avoir le temps d'apprendre, en particulier les outils d'IA que j'utilisais dans mes propres recherches. Hautement concernée par le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité, je n’arretais pas de me poser la question : à quoi bon faire de la physique des hautes énergies sur une planète en feu et mourante ?
Dans ce colloque, j'expliquerai pourquoi j'ai décidé d'aller enseigner en Afrique, pourquoi concevoir le cours que j’ai toujours rêvé d’enseigner (“Machine Learning in Particle Physics”) a réduit mon syndrome de l'imposteur et comment l'AIMS, l'Institut Africain pour les Sciences Mathématiques, donne aux jeunes talents africains l'opportunité d’exceller. Je partagerai les histoires et les découvertes de ces six mois passés dans huit pays différents, donnant des conférences et des présentations devant des étudiants attentifs et assoiffés de connaissances. Ce fut un voyage de réflexion sur le “privilège blanc”, sur les obstacles auxquels les Africains sont confrontés et sur la manière de les surmonter. Cela m'amène au dernier point : les opportunités. Je terminerai par toutes les façons dont vous pouvez vous impliquer, que vous soyez étudiant·e de premier cycle ou bien physicien·ne à la retraite. La communauté scientifique internationale a besoin de l’Afrique, et l’Afrique a besoin… de vous !
Je n’aime pas vraiment les titres, alors vous pouvez omettre le mien et m’appeler Claire. Ceci étant dit, je ne veux pas entrer en conflit avec la bienséance locale et encore moins vous mettre en difficulté !
La fascination de Claire David pour les détecteurs de particules a commencé à l'âge de 15 ans en feuilletant un livre - The Universe in a Nutshell de Stephen Hawking - lors d'un camp d'été scientifique. Influencée par ses parents, elle s’inscrit en Master d’Ingénieur à l’Institut National des Sciences Appliquées, INSA de Toulouse. Mais elle rêvait du CERN, pas des sciences appliquées pour l'ingénierie. Lors d'un semestre d'échange à Berlin, elle suit des cours de physique des particules tout en travaillant sur l'électronique du détecteur IceCube. À sa question posée à un physicien sur la façon dont les graphes sont réalisés, Claire a reçu un « Il faut faire un doctorat pour ça ». Un an et 8000 km plus tard, Claire obtient une offre de doctorat lors de son dernier stage d'ingénierie à TRIUMF, Vancouver, avec l'Université de Victoria, travaillant sur le détecteur ATLAS (qui se trouve à 400 km de sa ville natale en France !). Rêve qui se réalise : un an au CERN en 2012 ! Après son doctorat en 2016, elle a obtenu la DESY Fellowship à Hambourg, en Allemagne, travaillant à la fois sur l'analyse des données et le prototypage de la nouvelle génération de détecteurs. En 2019, elle obtient un poste à l'Université York en tant que professeure assistante et scientifique associée au Laboratoire Fermi, partageant son temps entre la physique des collisionneurs avec ATLAS et la physique des neutrinos, co-lançant d'ailleurs le groupe canadien de la future expérience « Deep Underground Neutrino Experiment » : DUNE. Ce colloque ne va pas du tout aborder ces points, mais plutôt sur ce qui s’est passé fin 2021, sur la manière de poursuivre de nouveaux rêves et de rendre le monde un peu meilleur.