La contribution des tâches de réalité virtuelle au désir de communiquer en français langue seconde à l’extérieur de la salle de classe à Montréal
Sous la direction de recherche de Patricia Lamarre
Résumé
Depuis l’avènement de l’approche communicative, puis actionnelle, en enseignement des langues secondes (L2), des chercheurs comme Ellis (2003) ont relevé les différences individuelles entre apprenants, notamment concernant le désir de communiquer (DDC), défini comme « une disposition à entrer dans un discours à un moment spécifique avec une ou des personnes spécifiques, en utilisant la L2 » (MacIntyre et al., 1998, p.547). Il a ainsi été suggéré de faire du développement du DDC de plus en plus une priorité en enseignement des L2. À cet égard, la recherche indique que la communication assistée par ordinateur peut permettre d’augmenter le DDC (Rankin et al., 2006; Gonzalez-Lloret, 2017), en influençant l’anxiété langagière et le sentiment de compétence communicative perçu (SCCP), qui sont les deux antécédents directs du DDC.
L’émergence récente de la réalité virtuelle 360 (RV360), qui peut être définie comme un environnement immersif s’appuyant sur des photos ou vidéos reproduisant le monde réel et fournissant à l’utilisateur un fort sentiment de présence, ouvre un nouveau champ d’expérimentation en DDL. Nous proposons que la RV360 permettrait aux apprenants de L2 de prendre part à des simulations quasi authentiques diminuant leur anxiété et augmentant leur SCCP, améliorant ainsi leur DDC à l’extérieur de la salle de classe.
Pour répondre à notre questionnement, nous avons créé puis mis en place trois courtes tâches de simulation RV360 présentant des situations communicatives similaires à celles de la vie quotidienne des apprenants, comme payer son épicerie en français. Ces tâches sont ancrées dans la réalité sociolinguistique de l’environnement d’apprentissage : dans cette étude, Montréal, une métropole bilingue français-anglais ayant une variété régionale de français distincte.
Les 19 participants à cette recherche exploratoire sont des étudiants universitaires internationaux de FLS au niveau débutant. Une méthodologie mixte (prétest et posttest quantitatifs, journaux de bord et entrevues de groupe semi-dirigées) a été adoptée pour suivre l’évolution de leur SCCP, anxiété langagière et DDC, ainsi que pour cerner leurs défis quant à la pratique du français à Montréal et leur perception des tâches RV360 en tant qu’outil d’apprentissage préparant à la communication authentique en L2.
L’analyse des données indique que les défis à la communication en FLS dans le monde réel proviennent principalement d’une perception négative de son vocabulaire et de sa prononciation, combinée à l’anxiété liée à l’anticipation de ruptures de communication avec des locuteurs francophones. Face à cet écueil, les participants estiment globalement que les tâches RV360 sont un bon outil pour créer un pont entre la salle de classe et le monde réel et ainsi préparer aux interactions en L2 dans le monde réel, même si leur faible degré de difficulté et leur manque de flexibilité nuisent à leur authenticité. Les tâches RV360 ont ainsi contribué positivement (mais à degré variable selon les apprenants) à l’amélioration du DDC, principalement via le renforcement du SCCP.
La discussion des résultats fournit un nouvel éclairage sur les bonnes pratiques d’enseignement et sur l’élaboration de séquences didactiques intégrant la RV360 pour favoriser le DDC au niveau débutant. Ces séquences devraient en priorité intégrer l’enseignement stratégique et mettre l’accent sur la complexification progressive des tâches et la rétroaction, tout en doublant la réalisation des tâches RV360 d’une interaction humain-humain.