Félix Vallotton (1865-1925) intrigue, déroute, mais surtout fascine. Né dans une famille de la bonne bourgeoisie de Lausanne, il se rend en France, comme son compatriote Théophile Alexandre Steinlen (1859-1923), pour y parfaire son éducation artistique. Très cultivé (il tint sa vie durant un passionnant Journal et fut un remarquable écrivain et critique d’art), il s’engage dans l’aventure des jeunes revues artistico-littéraires et des feuilles satiriques, et se frotte, comme les peintres Paul Signac et Maximilien Luce, aux milieux anarchistes. Sans se départir de sa parfaite facture picturale, il se plaît dès lors à décrypter, avec un réalisme mordant à la Jules Renard dont il est si proche, les travers de la société, les écarts de conduite, les incohérences de la morale commune. Comme le résume si bien le critique Francis Jourdain, ce huguenot inquiet, morose et burlesque « ne cessera de scruter les beautés du Laid que pour soigneusement examiner les laideurs du Beau ». Longtemps confidentielle, sa peinture aura pourtant une grande influence sur la Nouvelle Objectivité en Allemagne dans les années 1920-1930 et fascine aujourd’hui nombre de peintres contemporains.
Gilles Genty, après des études d’histoire de l’art, a été chargé de cours à l’École du Louvre (Paris), puis professeur d’histoire de l’art. Il a été commissaire d’expositions internationales, dont Maurice Denis (Lyon, 1995), L’Impressionnisme de Corot à Renoir (Brescia, 1998), De Caillebotte à Picasso (Québec, 2006), Toulouse-Lautrec (Montréal, 2016). Il a été directeur du musée du Petit Palais de Genève (Suisse). Il est co-commissaire de l’exposition Paris au temps du postimpressionnisme : Signac et les Indépendants, présentée au Musée des beaux-arts de Montréal en 2020.