La trajectoire intellectuelle de penseurs, d’essayistes et d’intellectuels traverse une époque en balisant les idées et les débats qui l’animent et la caractérisent. Tout n’est pas dit pour autant par eux, mais l’on apprend ce que fut la discussion publique et, de surcroît pour nous, comment elle vient jusqu’à nous. Laurendeau, Lévesque, Vadeboncoeur et Miron ont parcouru le siècle de façon critique en relevant l’inertie, les défis, les accomplissements de leur temps.
ANDRÉ LAURENDEAU, un réformisme intellectuel et politique séduisant
André Laurendeau (1912-1968) aura été l’acteur et l’observateur le plus perspicace du milieu intellectuel et politique canadien-français et québécois. De la Crise des années 1930 au milieu des années 1960, il aura vu éclater « l’unité spirituelle » du Canada français. Observateur subtil du changement, il a regardé son milieu avec une fidélité critique. Trouve-t-on souvent un réformiste qui ne soit pas terne, qui soit piquant dans ses analyses?
GEORGES-HENRI LÉVESQUE, un dominicain, un passeur
Le jeune dominicain (1903-2000) commence sa vie en remettant en cause l’orientation du prestigieux abbé Lionel Groulx et en déplaisant à Maurice Duplessis. De pensée libérale, il défendra deux principes : la primauté du spirituel et la pertinence de distinguer, de séparer. Ceux qui appuieront la grève d’Asbestos et qui feront la révolution seront passés par sa Faculté des sciences sociales. Le père Lévesque subvertira l’Église et la tradition de l’intérieur en fournissant aux contestataires des visas pour sortir de l’autoritarisme et de la pesanteur.
PIERRE VADEBONCOEUR, la ligne du risque : de Borduas à Cité libre et à Parti pris
Conseiller juridique dans le milieu syndical, Pierre Vadeboncoeur (1920-2010) y a développé un regard critique qui en fait le dénoueur le plus articulé de la mentalité québécoise traditionnelle. Cherchant comment le refus global pourrait bien s’appliquer comme stratégie à l’ensemble de la société, il a formulé une autre voie : la ligne du risque. Une ligne qui l’a mené de Cité libre à Parti pris tout en demeurant farouchement critique.
GASTON MIRON ou comment voir clair en soi affectivement, intellectuellement, politiquement
Venu d’un milieu analphabète, vivant un moment dans un noviciat, Gaston Miron (1928-1996) se donne ensuite les moyens de se « rapailler ». Ce long chemin, décrit dans ses textes en prose, balise sa marche vers la souveraineté personnelle et politique. Chez lui, la poétique nourrit le politique et fleurit en une compréhension inédite de la langue, de la culture, de la politique.
Conférencier
Yvan Lamonde est historien et professeur émérite de l’Université McGill. Il s’est intéressé à de nombreuses figures du libéralisme et du républicanisme, de Louis-Joseph Papineau à la famille Dessaulles en passant par l’Institut canadien, Arthur Buies et les intellectuelles (publications, site Internet).